Dossier Enquête Publique de Palaiseau Terre solidaire

Enquête publique relative au projet de la ligne 18 du réseau de transport du Grand Paris Express

Cette enquête publique, est l’occasion de remettre totalement à plat le projet de la ligne 18, en prenant en compte la nécessité d’adapter les politiques publiques dans le contexte nouveau lié à l’épidémie de COVID-19, au développement du télétravail, au besoin de réduire la promiscuité dans les transports en commun. 

Il est impératif de répondre aux véritables besoins en transports en commun dans le cadre de la transition écologique, en préservant les rares terres agricoles restant en Île de France.

Si nul ne peut nier l’urgence d’améliorer les transports en commun dans le secteur du plateau de Palaiseau et de la vallée, jamais l’utilité de la ligne 18 n’a été démontrée. Aucune étude digne de ce nom n’a pu montrer l’existence d’un besoin de transport de la zone banlieue ouest vers la banlieue sud. 

La seule étude sérieuse est celle qui démontre l’inutilité de la ligne 18, produite par Jacqueline LORTHIOIS urbaniste socio-économiste, sur les circulations en Région Parisienne. Elle a présenté cette étude lors des assises sur la mobilité à SUPELEC, le 18 novembre 2017, démontrant que la ligne 18 ne se justifie absolument pas (voir document en annexe).  

La section Saclay-Versailles, notamment, ne permettrait de raccourcir que de quelques minutes la durée du trajet Orly – Saclay – Versailles. Dès 2015, le Commissariat général à l’investissement, sous l’autorité du Premier ministre, avait d’ailleurs rendu un avis défavorable à ce sujet.

L’agrandissement des emprises pour les voies et le centre de maintenance entraînera le déclassement d’environ 2 hectares d’espaces boisés classés provoquant une coupure infranchissable de plus d’1 km (zone de transition tunnel/viaduc) au croisement de 2 corridors écologiques. L’enquête de 2016 affirmait pourtant que “cette transition constitue une coupure infranchissable au sein du territoire, aussi l’objectif est d’en réduire autant que possible la longueur”.

Bien des voix se sont élevées contre le coût exorbitant consacré à la construction de cette ligne de prestige au détriment de l’amélioration urgente des lignes RER B et C. Le RER B, en pleine crise, transporte quotidiennement 1 million de voyageurs dans des conditions insupportables alors que les prévisions les plus optimistes pour la ligne 18 se chiffrent au mieux  à 45 000 voyageurs quotidiens.

Un nombre croissant de grandes villes envisage la mise en place de téléphériques urbains, solution bien moins coûteuse qu’un transport lourd. Cette solution (ou d’autres toutes moins coûteuses) pourrait très bien être adoptée pour relier le pôle scientifique et le CEA du plateau de Saclay à la ligne B du RER.

Rappelons aussi que la capacité du transit routier est doublée par le CD 36 en deux voies, avec un transport par car en site propre (TCSP).

En gaspillant d’énormes sommes d’argent public et en sacrifiant à terme un territoire à vocation agricole, ce projet de ligne 18 ne cache-t-il pas une volonté de spéculation foncière et d’urbanisation totale du plateau de Saclay ?  

En conclusion.

Palaiseau Terre Solidaire proteste contre les conditions dans lesquelles se réalise cette enquête d’utilité publique, sans aucune réunion publique, malgré des modifications majeures et des surcoûts importants du projet.

À l’heure où la pandémie du coronavirus nous amène à remettre en question nos modes de fonctionnement et de comportement, le temps n’est-il pas venu de revoir complètement les rapports entre ceux qui décident et ceux qui subissent ?

À l’heure où l’urgence climatique se fait pressante, ne faut-il pas veiller à préserver les rares terres agricoles d’Île de France ?

Face aux évolutions du projet, à ses surcoûts, aux fortes incertitudes économiques et démographiques actuelles, aux oppositions, inquiétudes et réserves exprimées par la population et les experts, nous demandons un moratoire immédiat pour une remise à plat complète de la déclaration d’utilité publique.

Nous demandons une véritable concertation publique de grande ampleur pour redéfinir les besoins réels de notre région en matière de transports en commun et de préservation des espaces agricoles.

Palaiseau Terre Solidaire :

(*) Groupe de citoyennes et citoyens s’étant présenté aux dernières élections municipales à Palaiseau et ayant une élue dans l’opposition.

Palaiseau le 17 juillet 2020.

Annexe :

Nous joignons ci-après à notre participation, l’étude déjà produite de Jacqueline LORTHIOIS sur les circulations en Région Parisienne, étude qu’elle a présentée lors des assises sur la mobilité à SUPPELEC le 18 novembre 2017, démontrant que la ligne 18 ne se justifie absolument pas.  

Jacqueline LORTHIOIS                                                                     Cergy, le 25 Avril 2016

urbaniste, socio-économiste

UN MOYEN DE TRANSPORTS LOURD DESTRUCTURERAIT 

LE FONCTIONNEMENT EN BASSINS DE VIE EQUILIBRES DE CE TERRITOIRE

DEFINITIONS :

Pôle d’emploi : concentration d’activités et d’emplois qui génère une attraction positive sur la

population active sur le territoire environnant.  Les flux domicile-travail convergent vers le pôle, ils sont centripètes.

Bassin d’emploi : aire d’attraction d’un pôle d’emploi

Pôle de main-d’oeuvre : concentration d’actifs ayant un emploi générant une diffusion de travailleurs vers les pôles d’emplois extérieurs. Les flux domicile-travail sont centrifuges.

Bassin de main-d’oeuvre : aire de diffusion d’un pôle de main-d’oeuvre.

1

Spécialisée dans l’analyse des équilibres Emploi / Main-d’Oeuvre en Ile-de-France, j’ai voulu

étudier les déplacements domicile-travail sur le tracé de la future ligne 18, afin d’évaluer la

pertinence de créer une offre de transport lourd entre l’Essonne et les Yvelines. J’ai choisi cette catégorie de déplacements, car ce sont les plus contraints, les plus longs et les plus structurants sur le plan territorial. En effet, la dernière Enquête Globale des Transports Ile-de-France (EGT 2010)a montré que les flux non contraints (loisirs, achats, services, démarches administratives…) sont en majorité de quelques kilomètres et se traitent dans un périmètre de proximité.

La ligne 18 est un grand axe de transport lourd qui devrait assurer une fonction de transit

traversant la grande banlieue Sud selon un tracé Est-Ouest, joignant l’Essonne aux Yvelines.

J’ai pris 4 exemples dans les 3 bassins principaux traversés par la ligne 18 :

– le pôle d’emploi de Massy et son bassin d’emplois (carte 1) qui constitue une étude de cas de

l’attraction de l’alignement de pôles d’emplois les Ulis-Palaiseau-Massy ;

– la commune du Chesnay et son bassin de main d’œuvre 2  (carte 2) qui appartient au bassin

d’emploi Versailles-Vélizy ;

– la commune de Trappes et son bassin de Main-d’œuvre 3  (carte 3) qui fait partie du bassin

d’emploi du « Grand-St-Quentin-en Yvelines » (SQY);

– la commune de Plaisir et son bassin de Main-d’Oeuvre (carte 4) qui représente un autre cas de figure très différent, toujours du bassin d’emploi du Grand SQY.

Ne figurent sur les cartes que des flux « aller » supérieurs à 100 actifs.

1er  constat : Aucun flux important n’apparaît entre le bassin de l’Essonne (Massy) et les bassins des Yvelines (Saint-Quentin et Versailles). Ni dans un sens, ni dans l’autre. Ce qui semble montrer une segmentation du territoire en 3 bassins autonomes, à l’opposé d’une vision d’un « grand territoire plateau de Saclay », concept ne reposant pas sur ce qu’on appelle un « territoire vécu » (correspondant aux pratiques des habitants). D’où une demande inexistante d’un grand axe de transit.

1Pour en savoir plus : voir www.j-lorthiois.fr, in Concepts généraux : « bassins d’emplois et de main-d’oeuvre en IDF. 

2J’ai estimé que le pôle d’emploi Versailles-Vélizy qui possède une attraction forte sur le 92  est situé trop au Nord de notre zone d’études. Et l’intercommunalité Versailles-Grand Parc possède peu de communes d’une taille

significative, comme le Chesnay. Il s’agit aussi d’un cas de « population aisée » qui le distingue de Trappes. 

3L’intérêt de la ville de Trappes – outre son caractère de banlieue populaire – est qu’elle ne possède aucun flux domicile ravail de plus de actifs en dehors d’un périmètre de proximité.

2ème constat : les liaisons de proximité sont essentielles. Même dans le cas d’une commune en site sensible comme Trappes, la rubrique « autres 78 » ne concerne que des petits flux inférieurs à 100. On ne compte aucun déplacement important extérieur au département.

L’adéquation Travail-Emploi est particulièrement élevée dans le cas du bassin du Grand-St-Quentin en Yvelines (12 communes). Une ville comme Maurepas par exemple – pourtant déficitaire en emploi – couvre à 75 % les besoins de sa main-d’oeuvre dans une aire de proximité de 14 kms et 25 % de ses actifs occupés quittent les Yvelines vers une destination extérieure, dont Paris. Ce qui place le bassin de ST Quentin en Yvelines comme disposant du meilleur taux d’autonomie de tous les bassins de grande banlieue francilienne. Des déplacements aussi courts peuvent s’effectuer par bus, vélo ou tramway (pour les flux les plus nombreux). Ainsi, les besoins de transports pour l’essentiel sont des besoins de desserte et non de transit.

3ème constat : les déplacements domicile-travail aller vont de la périphérie vers le centre. Leur tracé est à l’inverse de la ligne 18. Les flux vont :

– du Sud vers le Nord dans le bassin de Massy, alors que la ligne 18 va d’Est en Ouest ;

– Ouest-Est dans les bassins de St Quentin et de Versailles-Vélizy, alors que le tronçon de la ligne 18 qui traverse ce territoire va du Sud au Nord. Une commune comme Plaisir par exemple fonctionne à la fois dans un bassin de proximité pratiquement entièrement déporté à l’Est jusqu’à Vélizy, couvrant ses besoins à 72 % dans les Yvelines et par ailleurs reliée à la capitale pour 25 % de ses flux (pôle Montparnasse/Boulogne ; quartier central des affaires -QCA- 8ème et 16ème/La Défense). Et Vélizy attire un bassin de main-d’oeuvre situé sur la partie du 92 au Sud du 15ème arrondissement (Chaville, Meudon, Clamart, Sèvres… )

En conséquence, il n’y a guère de demande pour un grand axe traversant joignant le 91 et le 78. Les besoins sont de transports de desserte effectuant des liaisons de cabotage d’une commune à l’autre. Un métro express avec quelques gares ne correspond absolument pas aux besoins actuels.

On peut argumenter alors que la ligne 18 pourrait structurer différemment le territoire dans un futur plus lointain. Mais à quel prix ? Il y a dans cette portion de banlieue sud une adéquation

harmonieuse entre les emplois implantés et les besoins de la population active. Un cercle

vertueux qui permet des temps de transports réduits, une plus grande demande des modes doux et une présence plus longue au domicile, qui fait vivre des « emplois présentiels » plus nombreux (services à la personne, filières sanitaire et sociale, culture et loisirs, enseignement-formation, économie sociale et solidaire, petits commerces et artisanat…) qui diminuent encore le besoin d’emplois extérieurs.

A quoi bon bouleverser cet équilibre par une urbanisation massive qui déstructurerait complètement des liens territoriaux de proximité qui constituent une exception heureuse en Ile-de-France ? Il vaut beaucoup mieux dépenser les sommes prévues pour les transports à améliorer l’existant et à renforcer l’offre de proximité par des systèmes de desserte par bassins, en bonne correspondance avec les pratiques et les besoins des populations.

Palaiseau le 17 juillet 2020.

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